Avant d’aborder ce livre, demandez-vous si vous êtes en grande forme psychique. Pour ceux ou celles qui habitent le Québec, il est certainement à proscrire en ces longs mois d’hiver où la moitié de la population déprime dû au manque de lumière. Revenez-y donc au printemps, frais et dispo. Parce que dans ce roman, on y décortique la folie sous toutes ses formes. Et il ne serait pas exagéré de dire qu’en réalité, il offre en soi un synopsis assez précis et juste du DSM 5R. Mais est-ce pour autant un roman médiocre? Pas du tout, bien au contraire… Seulement, le style est lourd et les personnages aussi malsains les uns que les autres.
Il m’est difficile de faire une brève critique sans en comparer le Rochester de Jane Eyre (Charlotte Brontë) avec le Heathcliff de celui-ci, tous deux, étonnants de ressemblances. Si Rochester est mystérieux, solitaire, antisocial, autoritaire, sec, froid et méprisant, Heathcliff présente les mêmes traits, auxquels j’ajouterais la violence, l’irrespect, la cruauté, la tyrannie et la hargne. Vous tenez le coup? Personnellement, je n’étais pas certaine d’avoir envie de poursuivre cette lecture, d’autant plus que les autres personnages ne m’offraient pas un portrait beaucoup plus reluisant. Dans l’ensemble, les psychés sont morbides et dysfonctionnelles. Certaines y voient des fantômes, des spectres, des diables et Satan. Les dialogues sont teintés de pleurs, caprices, hystérie et menaces. Aucun état d’âme ne nous est épargné. Les rapports sont tordus et malsains. De plus, on se perd complètement dans les noms. Heureusement, un tableau généalogique en début de livre vient secourir nos amnésies momentanées.
Paradoxalement, je suis heureuse d’avoir mené à terme cette lecture. C’est l’œuvre d’une femme qui a défié les pensées de son époque pour s’ouvrir sur un monde alors mal compris : la folie. Rappelons qu’Emily Brontë est née en 1818. Il ne fait donc nul doute dans mon esprit que son roman a fait l’objet d’indignation et de soulèvement populaire. Je crois que pour s’y connaître aussi bien sur les déviations de la psyché, il faille les avoir côtoyées de près dans son environnement immédiat. Je n’ai pas analysé son histoire familiale, ni les liens qui unissaient ses membres, encore moins n’ai-je cherché à savoir si ce livre s’offrait, au même titre que Jane Eyre, comme une autographie de l’auteure. Mais les traces de son propre héritage transpirent à chaque page. Elles sont bourrasques de vent, fidèles au titre de ce grand roman…