Photo prise par Sebastiao Salgado
La marelle de Samin
Sur un béton rouillé habité par les ronces
fils de fer, terrain vague, un dépotoir immonde
Samin trace à la craie les contours de son monde
au loin c’est cris d’obus de chars coups de semonces.
Craie bleue deux demi ronds pour le ciel et la terre
un nombre par case se choisit un galet
point bleu pour i de ciel sans faute écrit enfer
puis saute à cloche-pied en poussant son palet.
Il lance sa marelle avance en sautillant
il esquive l’enfer réussit la culotte
il est à la porte d’un éden scintillant;
au loin c’est cris au but et sombres bruits de bottes.
Il a franchi le neuf ce sans mordre une ligne
pose son pied léger sur le beau i de ciel,
son corps vole en éclats, une mine maligne
pour moins qu’une tu meurs en cris trop démentiels.
Un an de pleurs mouillés les ronces ont grandi
Samin à cloche-pied pousse la chansonnette
les armes se sont tues, les affaires, on dit?
Sur un amas d’ordures il tire une charrette.
Les armes se sont tues
ça lui fait une belle jambe.
Toutes les armes tuent
à tutoyer la mort.
À vous enfants niés d’un monde où la vie est en guerre
à vous enfants de ces charniers en fouillis sous la terre :
Ces charognards vous volent
les doux œufs de vos nids
et ils tuent et ils violent
par-dessus ça ils nient.
J-C Eloy - 2005