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13 avril 2015 1 13 /04 /avril /2015 01:24
Beauvoir in love - Irène Frain

« C’est ma vie et je l’ai vécue comme je voulais la vivre… Le monde réel est un vrai foutoir »

 

« On ne naît pas femme, on le devient »

 

Si vous pensiez que Simone de Beauvoir passait ses samedis soirs dans la quiétude de son foyer à boire de la tisane détrompez-vous! La mère de l’existentialisme, fraîchement débarquée à New York dans les années 40 pour donner une série de conférences, n’aura de cesse de s’envoyer en l’air et de faire la fête - Sartre en fera tout autant à Paris avec une certaine Dolorès. Chaque soir, dans les bas-fonds de la ville, ce sera jazz et caves enfumées à s’enfiler des whiskies, non sans avoir oublié de se bourrer préalablement d’amphétamines. La personne qui m’a offert ce livre savait que je me régalerais de découvrir cette grande dame que j’admire tant sous des dehors plus humains, à tout le moins plus éclatés. Dans les bars douteux et les planques à junkies, Simone est délicieuse…

 

C’est dans ce décor « idyllique » qu’elle rencontrera Nelson Algren, un écrivain de Chicago, l’homme qui, de son propre aveu, fut la seule grande passion de sa vie. Un homme débordant d’humour avec un pouvoir de séduction irrésistible, engagé dans le camp des pauvres et des opprimés. Elle quittera Sartre pour lui, mais lorsqu’elle apprendra sa liaison avec Dolorès, elle coupera contact, s’obstinera à le fuir. En vain… Après des semaines de bouderies, elle reviendra vers lui pour l’éviter à nouveau. Tourmentée, elle retombera dans les amphétamines, la boisson et l’écriture à outrance. Pour revenir vers Nelson… Une spirale infernale qui durera des années et aux termes de laquelle elle se résoudra à reconnaître que Sartre a une réelle emprise sur elle.

 

Loin d’être dupe, Nelson la confrontera à plusieurs reprises, insistera sur ce que représente Sartre à ses yeux. Ce à quoi elle répondra que s’ils ont été amants, tout est fini depuis des années. Qu’ils ne sont liés que par le travail et que si elle a une communion de pensées avec lui comme elle ne l’a jamais eue avec personne, Nelson est le seul qui compte. Cela ne lui suffit pas, elle réalise que si elle veut le garder elle devra être honnête envers lui, mais comment le lui dire? Comme lui dire que tout ce qu’elle souhaite est qu’il l’aime mais qu’il la laisse repartir au gré de ses envies? Elle y renoncera. Jamais elle n’y sera arrivée…

 

Il la quitte à son tour et la spirale repart en sens inverse. Elle se drogue aux barbituriques et plonge dans un sommeil hanté par les cauchemars. Les crises de nerfs s’enchaînent, Simone dérape, tente de le reconquérir et finit par en perdre toutes ses passions. Où sont passés ses larmes, ses protestations, ses élans de gamine, le regard du plaisir quand elle jouissait? Simone parvient enfin à choisir entre ses passions contradictoires et renonce à une liaison sans issue pour aller sagement finir ses jours dans les bras de son premier amour… Quelle tristesse! Durant quatorze ans ils se sont écrits plus de 300 lettres. Amoureux fou, Nelson n’aura jamais pu lui donner moins que de l’amour…

 

Ces 450 pages nous permettent de découvrir une femme dont les amours tourmentées ont mené progressivement au désespoir. Une femme d’une grande intelligence - philosophe et romancière - têtue, provocante, persistante et fascinante à la fois...

 

« I don’t think anything’s true that doesn’t have poetry on it »

Nelson Algren

Beauvoir in love - Irène Frain
Beauvoir in love - Irène Frain

commentaires

C
Beauvoir, dans ma jeunesse, c'était pour nous, les filles, un guide, une icône, oui, comme le dit Eeguab, pour l'émancipation de la femme, pour lutter contre les stéréotypes et les prisons dans lesquelles on enfermait les femmes; mais quand Irène Frain nous la montre ainsi, dépendante à ce point d'un homme, cela me défrise un peu!
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N
Après ma lecture, je n’ai pas ressenti une dépendance de la part de cette femme, mais ce n’est que mon opinion bien sûr. J’avais plutôt l’impression de faire face à une femme indécise, incapable d’exercer des choix et tourmentée (en détresse?) du fait de ces dilemmes…
L
Laisse tomber les amphets, allons écouter du jazz dans des caves enfumés et enfilons-nous des whiskies toute la nuit ! J'admire ces bars douteux.
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N
J’admire ces bars douteux et les nuages unibrouesques qui sentent la vie :D<br /> Alors amène-toi Bison avec ton poil pis tes sabots et festoyons Tabarnak, la nuit est encore jeune!<br /> Tu connais l’adresse dans Central Park ;-)
N
J'ai très envie de lire Le deuxième sexe de Beauvoir depuis très longtemps... cette femme me fascine. Ce livre d'Irène Frain doit être passionnant à l'image de la vie de Simone de Beauvoir.
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N
Derrière « Le deuxième sexe » se cache une femme dans toute sa splendeur, belle et affirmée…
M
Je ne connaissais pas ce livre , par contre j'ai lu et adoré, " Lettres à Nelson Algreen" de Simone de Beauvoir, que tu dois connaître. Pour moi, Sartre était l'homme de sa vie et Algreen, l'amour de sa vie...une grande dame et une belle histoire...
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N
« Sartre était l'homme de sa vie et Algreen, l'amour de sa vie ». <br /> Comme c’est bien dit!
M
D'Irène Frain, je n'ai lu que Secret de famille à sa sortie en 1989... Houllaaa le coup de vieux ! ^^<br /> Celui m'a l'air très bien et c'est intéressant d'en savoir plus sur un personnage tel que Simone de Beauvoir. <br /> Il y a quelque mois, j'ai vu "Violette", un biopic sur Violette Leduc avec Emmanuelle Devos où il était question, entre autre, de de l'amour de Violette Leduc pour Beauvoir. Un film à voir.
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N
Fascinante, émouvante… ;-)
M
C'est gentil...j'avais dit ça à l'époque où j'avais chroniqué le livre...c'est ce que j'ai compris ou ressenti en lisant le pavé des lettres de la mère Simone...fascinante dame !
N
T’en fais pas « le vieux », on y passe tous! mdrrrrr<br /> Un biopic sur Violette Leduc, je veux le voir!<br /> Un grand amour passionné. Et deux magnifiques portraits de femmes… <br /> Signé : Ta vieille croûte ^^
C
C'est bizarre cette idée que j'ai de penser que les femmes du siècle dernier étaient plus prudes et plus coincées que nous. Il n'en est rien et elle avait bien raison la Simone de s'envoyer en l'air pendant que Sartre faisait la même chose ^^ :)<br /> <br /> Il me semble n'avoir rien lu d'Irène Frain, pourtant très populaire en France. Il va falloir remédier à ça. En tout cas tu m'as donné envie de découvrir cette Philosophe. Mais chut ^^ ne disons rien à Mathilde sinon elle va me saouler et va me sortir toutes sortes de thèses et d'antithèse sur la Simone ;-)<br /> <br /> Un billet très tentant <br /> <br /> P'tits Becs ma Blonde ;-) XX
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N
Elle avait bien raison oui! ^^ Non mais… ;-)<br /> Tu me donnes le courriel de Mathilde, j’ai deux p’tits mots à lui dire mdrrrrrr<br /> P’tits becs et bonne journée ma rousse ptdr :D xxx
E
Hello Nad. Personnellement je n'aime pas beaucoup l'icône Beauvoir mais j'ai lu Un fils d'Amérique de Nelson Algren et je connais leur histoire d'amour. Une époque passionnante et des héros souvent complexes et contradictoires.<br /> Pour Karel Schoeman, cinq livres ont été traduits en France. Je crois les avoir tous chroniqués. Mon préféré est En étrange pays mais je conseille souvent un livre plus court pour un auteur encore inconnu. Pourquoi pas La saison des adieux. Merci Nad de tes gentilles visites et à bientôt.
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N
J’ai toujours été fascinée par ces couples d’artistes marginaux. Comme Camile et Rodin, Frida et Diego, Antonin Artaud et Génica… Des passionnés comme je les aime, à l’âme tourmentée, complexe, explosive. Des gens qui vivent en marge, avec un regard différent sur les choses qui les entourent, une appréhension du monde authentique et sans fard…<br /> Merci Pour Schoeman ;-)

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